Un avis de vigilance et de responsabilité collective : Retour sur l’avis du CNLE concernant le nouveau régime de sanctions
J’ai eu l’opportunité de contribuer à l’élaboration de l’avis rendu le 9 mai 2025 par le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE), à propos du projet de décret réformant le régime des droits et obligations des allocataires du RSA. Loin d’un simple rejet, cet avis s’inscrit dans une démarche de responsabilité, d’écoute du terrain et de propositions concrètes.
Une parole forte en faveur des plus fragiles
Face à un décret qui risque de fragiliser davantage des personnes déjà en grande précarité, le CNLE a choisi de faire entendre la voix des allocataires et de rappeler que l’objectif de toute politique sociale doit rester la lutte contre la pauvreté, et non la gestion par la sanction.
Des propositions concrètes pour un accompagnement juste
L’avis du CNLE ne se contente pas d’alerter : il propose des aménagements précis pour rendre le système plus juste et plus efficace :
- Remplacer les sanctions automatiques par des convocations pédagogiques pour rappeler les engagements, dans une logique de dialogue plutôt que de punition.
- Allonger les délais de recours de 10 à 30 jours, pour garantir aux personnes concernées le temps d’être informées, accompagnées, et de faire valoir leurs droits.
- Encadrer strictement les procédures d’information, avec des moyens adaptés (accueil physique, téléphone, numérique), comme le recommande également le Défenseur des droits.
- Publier les données de radiation et de sanction, pour assurer transparence et équité entre les territoires, et éviter des écarts injustifiés d’un département à l’autre.
- Rappeler le droit constitutionnel à des moyens convenables d’existence, en proposant la mise en place d’un revenu plancher, afin que personne ne se retrouve sans aucun revenu en France.
Une attention portée à la réalité humaine
Le CNLE a donné une place précieuse à l’expression des personnes concernées. Le témoignage bouleversant d’une allocataire du RSA – confrontée à la suspension de ses droits – rappelle que derrière chaque réforme, ce sont des vies qui basculent.
Une vision équilibrée de l’action publique
Loin de refuser toute évolution, l’avis du CNLE appelle à un véritable accompagnement global et multidimensionnel, adapté aux réalités des allocataires, fondé sur le respect, l’écoute et la progressivité. Il alerte contre l’assimilation des allocataires du RSA aux seuls demandeurs d’emploi, oubliant la logique de solidarité nationale qui sous-tend cette prestation.
Cet avis du CNLE, auquel j’ai eu l’opportunité de contribuer, témoigne de la richesse d’un dialogue entre l’expertise, l’expérience vécue, et les institutions. Il ne s’agit pas de bloquer une réforme par principe, mais de veiller à ce qu’elle soit juste, applicable, et conforme aux valeurs républicaines.
Dans une période où les fractures sociales s’accentuent, cette parole collective est un appel à la cohérence, à la dignité, et à l’humanité de notre modèle social.
